Jour 59 - Ponferrada à Pereje (27 km)
Je n'ai plus mal aux pieds. Sans ampoules, la vie de cheminante est tellement plus belle!
Une belle journée de marche avec un paysage vallonné et des vignobles aux couleurs d'automne. Il fait beau avec juste un peu de brouillard et de fraîcheur le matin mais chaud et ensoleillé l'après-midi.
J'ai marché avec Diane jusqu'à Pieros ou je me suis arrêtée pour pique-niquer. Diane est partie sur ses grandes enjambés et je ne la reverrai pas de la journée.
Il y a une variante pour se rendre à Villafranca et je pense avoir pris le chemin le plus long mais je ne le regrette pas. Je traverse une zone de vignobles très belle et tranquille.
La traversée de Villafranca est un peu mélangeante. Il y a des flèches jaunes un peu partout, qui parfois indiquent deux directions opposées. Allez savoir laquelle choisir! Je pensais retrouver Diane. Une Québecoise assise à une terrasse de café me dit qu'elle est passée par là il y a tout juste 10 minutes et qu'elle me cherchait. Je continue pensant peut-être la rattraper. On peut toujours rêver!
En sortant de Villafranca, c'est Jean-Marc que je retrouve sur le sentier et nous marcherons ensemble jusqu'à Pereje. Comme c'est le village-étape que nous nous étions fixé pour aujourd'hui, je pensais retrouver Diane à l'unique auberge du village mais elle n'y est pas. Elle m'informe plus tard par email qu'elle a décidé de continuer jusqu'au village suivant car celui-ci ne lui plaisait pas.
L'auberge est très bien, dans une vieille maison de pierres avec pour une fois pas de lits superposés. Je me retrouve la seule femme dans un dortoir de 12 lits. Nous ne serons que 5 avec Jean-Marc, Dirk un jeune Allemand qui vit à Londres et qui parle anglais et espagnol, et deux Espagnols, l'un très sympathique Antonio mais qui ne parle qu'espagnol et l'autre antipathique dont je ne me souviens plus du nom.
Il y a un troisième Espagnol, Vicente, que je n'ai pas encore eu la chance de rencontrer et qui marchait avec eux, mais que j'ai surnommé le flécheur du Camino. Depuis plusieurs jours, il égaille le sentier en faisant de magnifiques compositions florales en forme de flèches tout au long du chemin. Diane l'a déjà remarqué car il se promène avec un sac en plastique et elle l'a vu en train de cueillir des fleurs qui dépassaient des jardins. J'ai commencé à prendre ses flèches en photo à partir de Pereje.
Nous nous retrouvons tous les cinq pour souper à l'unique bar-restaurant du village ou nous serons très bien reçu avec dans mon assiette truite, légumes et flan en dessert.
L'albergue avec ses vieilles pierres et son dortoir en sous-sol sera frais et humide pour dormir. J'ai commencé à avoir un mal de gorge et le nez bouché, ce qui me vaudra le lendemain matin de me faire fusiller du regard par l'Espagnol antipathique accompagné d'un commentaire cinglant à l'effet que j'ai ronflé et l'ai empêché de dormir. Lui de son côté ne s'est pas gêné pour se promener en balayant le dortoir de long en large avec sa frontale bien trop de bonne heure alors que tout le monde dormait encore. Je ne crois pas que j'étais la seule à ronfler cette nuit là. En plus il y avait Antonio qui lui n'arrêtait pas de tousser. Ça fait partie des joies des nuits en dortoir!
Jour 60 - Pereje à O'Cebreiro (22,5 km)
Je m'arrête déjeuner au bout de 4km à Trabadelo là ou Diane a dormi, servie par une aubergiste qui semble frustrée et n'est pas très sympathique.
Je passe beaucoup de villages. Il y a des annonces partout pour des hébergements. Cette partie du Camino commence à être plus commerciale car on est à moins de 200 km du but. On rentre dans une zone ou le nombre de pèlerins est de plus en plus nombreux en saison, donc ça devient un peu une usine à pèlerins. En plus, en fin de saison, ils doivent être fatigués et tannés de nous voir.
Le chemin longe la route et parfois l'autoroute passe sur un viaduc juste au-dessus du village. C'est pas terrible comme environnement pour ces villageois qui devaient auparavant savourer le paysage bucolique de cette vallée. Maintenant ils font face au béton.
La route longe aussi une rivière. Cette vallée avec ses nombreux châtaigniers me rappelle mon Ardèche natale. Après Las Herrerias (km 14), cela monte tout le long.
Je m'arrête à La Faba (km 18, 900 m) pour manger dans un bar. C'est incroyable qu'en Espagne le choix de nourriture soit aussi limité dans les bars. S'il n'y a pas de tortilla de patatas, la seule autre option c'est un sandwich. Je ne comprends pas pourquoi ils ne servent pas autre chose comme des salades par exemple. Je me commande un sandwich avec omelette française au fromage. Au bout de quelques minutes, on se retrouve toute une gang de pèlerins: Jean-Marc, Dirk, le trio Annick-Michelle-Barbara et un cycliste Allemand. Finalement, presque tous commande un sandwich comme le miens qui est, somme toute, excellent.
La montée à travers les châtaigniers est plaisante. Ensuite la vue sur les montagnes est superbe. Je rencontre Carmen, une parisienne, alors que j’atteins la borne qui m'indique que je viens d'arriver en Galice.
Il me faudra 6h45 pour parcourir ces 22,5 km et 800 m de dénivelé. Cela me fait plaisir de voir le comité d’accueil qui m'attend à l'entrée de O'Ceibrero, composé de Diane, Jean-Marc et la Québécoise (j'ai oublié son nom).
O'Ceibreiro est un village charmant, très bien conservé et restauré mais un lieu qui doit être très touristique en été. La visite d'une maison traditionnelle ronde et au toit de chaume reconstituée est intéressante.
On assiste à la messe de 18 h dans une jolie église du XIe siècle avec les moines et une poignée de pèlerins.
Pour le souper, on goûte à la tarte de Compostelle faite avec des amandes, une spécialité de la Galice. Cela change du yaourt, du riz au lait, du flan, de la crème glacée ou de la crème à la vanille (natilla). Mon impression de l'Espagne, c'est qu'ils ne sont pas doués pour les desserts mais je ne sais pas si je devrais généraliser. En tout cas, ça fait plusieurs centaines de kilomètres que j'y pense!
L’accueil est plutôt froid dans tous les sens du terme au refuge de 100 places. On dort dans le dortoir no B d'une cinquantaine de lits superposés. Heureusement, il y a des radiateurs et on aura le chauffage la nuit. C'est moderne mais froid. Il y a une cuisine sans chaudrons ni ustensiles et une salle de bain avec des douches sans rideau de douche, ce qui en fait râler plusieurs dont Carmen qui trouve qu'on manque vraiment de respect pour les pèlerins. On a déjà la promiscuité des dortoirs, à cela s'ajoute ici celle des douches. Encore heureusement qu'elles ne sont pas mixtes!