C'est le 1er août 2022 que Diane et moi, ''section hikers'' du SIA, avons entamé notre 3e année sur le Sentier International des Appalaches (SIA) au même endroit (St-Vianney) ou l'on avait commencé l'été dernier. 9 jours pour compléter presque 100 km jusqu'au Petit-Sault, la section qu'on avait sauté l'été dernier à cause d'une blessure à ma cheville, qui est aussi réputée pour être la partie la plus difficile du SIA. Donc pas question de prendre cela à la légère côté préparation et équipement ni de sauter des étapes. On a décidé d'arrêter dormir dans chacun des abris du parcours même si certaines journées de randonnée semblaient courtes. L'idée ce n'était pas de faire la randonnée à la course mais bien de prendre son temps, de prendre des pauses, de profiter de chaque paysage et d'arriver suffisamment tôt à l'abri pour avoir le temps de relaxer et de jouer une partie de YUM chaque soir. Comme on avait réservé tous nos couchers dans les abris, on s'est donc un peu allégé avec le poids de la tente / bivouac en moins.
De la borne 478 à 382, que de chemin parcouru! Diane est tellement contente de terminer qu'elle en embrasse même la borne.
Pour la nourriture, on commence à être des expertes dans la déshydratation. Diane se spécialise dans les repas de pâtes déshydratées alors que j'ai un menu un peu plus varié mais toujours avec une base de pâtes sans gluten, du quinoa ou du riz et bien sur des lentilles, des fèves mung, fèves noires, pois chiches et plusieurs sortes de légumes. Et nouveauté cette année, j'avais aussi déshydraté une soupe minestrone maison ainsi que mes lunchs: des salades à base de quinoa ou de sorgho ainsi que du thon déshydraté que je réhydratais à froid le matin avant de partir et sans oublier les sachets de mayonnaise qui faisaient toute la différence et mon bonheur chaque midi. Ce qui malheureusement n'a pas trop changé c'est l'incontournable mais énergétique gruau du matin, qui même si je l'agrémente de toutes sortes de noix et fruits secs me paraît toujours aussi insipide et peu appétissant.Enfin, j'avais emporté un sachet d'oeufs déshydratés Happy Yak pour faire un peu changement du gruau.
Pour la logistique, comme on avait 2 véhicules, on en a laissé un à notre point d'arrivée au stationnement de Petit-Sault. Puis, on est revenu avec l'autre véhicule sur la route 1 qui traverse la réserve en déposant nos 2 boîtes de ravitaillement en chemin (lac Matane et stationnement des Pins). On a laissé le 2e véhicule à St-Vianney. La mauvaise surprise a été le changement de politique de la SÉPAQ qui exige des frais de stationnement depuis le mois de juillet. On dirait que tous les moyens sont bons pour la SÉPAQ de faire de l'argent sur le dos des randonneurs même si ils n'offrent aucun service supplémentaire et encore moins aux randonneurs du SIA. Mais cela nous a permis de faire la connaissance de Brigitte, une employée non pas de la SÉPAQ mais du bureau touristique ambulant à l'entrée du poste John. Brigitte est une personne extraordinaire avec qui nous avons pu échanger lors de nos 3 passages au poste John et c'est à elle que nous avons remis nos formulaires de plainte.
Finalement, mon sac pesait entre 24 livres (11 kilos) avec mes 2 litres d'eau pour 1 jour 1/2 de bouffe et environ 28 livres pour 4 jours de bouffe.
Pour les souliers, il semble qu'il y ait dernièrement une mode pour les espadrilles mais Diane et moi on préfère encore les bottes en Goretex qui nous protègent mieux les chevilles et nous gardent les pieds au sec plus longtemps.
Cette année j'étais vraiment bien préparée et en forme et on peut dire que tout s'est bien passé, même la dernière journée avec la montée et surtout la descente tant appréhendée du mont Nicol-Albert. La température a aussi été notre amie. On n'a pas connu de canicules comme l'été dernier à transpirer même sans effort. Il a fait majoritairement beau et la grosse pluie c'est dans la soirée ou la nuit qu'on l'a eu. Mais cela ne nous a pas empêché de marcher 2 jours avec les pieds mouillés car avec la boue, les herbes hautes et les fougères mouillées, même les chaussures en Gortex n'y résistent pas.
Ah! Les fougères de la réserve de Matane! On s'en souviendra longtemps....
Comment décrire cette section du sentier? Je pensais qu'on allait être au coeur de la forêt pendant 9 jours mais ce qui m'a fait mal au coeur c'est de voir le jour 3, en direction du Lac Tombereau, des sections entières de forêt détruite avec la coupe à blanc. L'industrie forestière est malheureusement très active dans la réserve faunique de Matane.
Dans cette section du SIA, ce sont des montées souvent abruptes à n'en plus finir, plusieurs monts entre 800 et 1000 mêtres à gravir et à descendre aussi, de magnifiques paysages de lacs, de montagnes et bien sur de forêts, des champs de graminées gigantesques et des champs de fougères géantes à traverser, à tel point que je me sentais parfois comme dans Indiana Jones.
Il y a eu aussi quelques traversées de cours d'eau surprenantes. Je dois dire que j'ai été un peu moins brave que Diane qui a traversé sur les 2 troncs d'arbres alors que j'ai déchaussé et préféré traverser à gué pour l'un d'eux.
Sur le SIA il faut s'attendre à toutes sortes de traversées de rivières: à gué, sur des passerelles suspendues ou même sur des troncs d'arbre avec corde pour garder son équilibre
En tout c'est environ 5600 mètres de dénivelé positif et négatif que nous avons fait en 9 jours. Pour la plupart des monts que l'on grimpait, j'en oubliais le nom presque aussitôt mais il y en a quelques uns qui m'ont plus marqué, comme le mont de l'Ouest, un de nos 1ers monts, ou l'on a rencontré une randonneuse expérimentée de la réserve qui nous a dit que cela allait juste être plus difficile de jour en jour. Je ne sais pas si elle voulait nous encourager ou nous donner l'heure juste mais elle avait raison . Par contre, avec le degré croissant de difficulté vient aussi la récompense car les paysages devenaient de plus en plus beaux.
Le mont Pointu (848 m) dont la montée m'a semblé longue et ardue, surtout vers la fin avec beaucoup de roches qu'on a gravi dans la brume mais le miracle s'est produit pendant notre pause lunch quand tout à coup la brume s'est dissipée pour nous dévoiler un magnifique panorama.
Et puis, il y a eu le mont Blanc, notre plus haut mont de la réserve avec ses 1063 m, et son banc avec vue imprenable, C'est là qu'on a pris notre pause lunch. Il y a aussi cette source d'eau fraîche ou on a rempli nos bouteilles. Après qu'on quitte le banc, on reste encore dans les hauteurs un bon moment avec un beau panorama.
Le miracle du mont Pointu
Il y a aussi le mont des disparus (900 m) qui lui m'a marqué car on a marché dans la boue une bonne partie de cette journée là et c'est aussi le seul endroit de la réserve ou on a failli se perdre. Il porte donc bien son nom car à force de regarder par terre ou mettre nos pieds pour ne pas trop s'enfoncer dans la boue, j'ai manqué la signalisation et suivi une trail d'orignal au lieu du sentier. Heureusement, on s'en est rendu compte assez vite et vu les traces dans la boue, on était les seules à avoir tourné en rond.
La journée du Mont-Blanc
Enfin, il y a le fameux mont Nicol-Abert (890 m) pour finir en beauté notre longue randonnée car c'est vrai qu'il est beau avec le paysage de falaise abrupte qu'on voit au début de la descente. Ce fût l'endroit le plus achalandé de notre traversée avec une dizaine de randonneurs d'un jour rencontrés. Les autres journées on ne rencontrait qu'une ou deux personnes par jour. Mais c'est aussi la section la plus technique.
Il y a de magnifiques chutes (13 selon ce que j'ai lu mais je ne les ai pas compté) qui s'enchaînent les unes après les autres. Le sentier se transforme en une suite de descentes le long de parois rocheuses avec des cordes pour nous aider. On se croirait en train de faire de l'escalade. Finalement, on a eu du plaisir en prenant notre temps dans cette section de descente d'environ 1,5 km.
En tout, il nous aura fallu quand même 11h pour parcourir les 14 km de cette dernière journée, la plus longue de tout notre SIA jusqu'à présent.
Journée du mont Nicol-Albert
Quelques unes des 13 chutes
Nous avons donc dormi dans tous les abris de la réserve. Quand j'aperçevais une toiture bleue au loin, je vivais toujours le même moment d'excitation car cela signifiait que nous venions de compléter une autre journée de notre aventure. Alors la routine du soir commencait: ôter nos souliers, enlever notre sac à dos, le vider, commencer à penser au souper, aller chercher de l'eau, manger, relaxer et terminer la soirée par une ou deux parties de jeu de YUM avant d'aller se coucher.
Les deux premières nuits j'ai assez mal dormi. Comme il faisait chaud, j'aurais voulu dormir à l'extérieur du sac de couchage mais les moustiques étaient omni-présents et voraces, alors j'ai du me couvrir complètement, même le visage et endurer la chaleur car c'était transpirer ou se faire piquer.
Certains abris ont été plus marquants que d'autres, comme celui du lac Matane, entouré de montagnes, qui est je pense le plus beau du SIA, avec vue plongeante sur le magnifique lac dans lequel j'ai eu beaucoup de plaisir à me baigner. Le soir on entendait les huards et la lumière du soir était très belle. Un autre abri qui m'a marqué mais négativement c'est celui du lac du Gros Ruisseau. Il faut déjà faire un détour sur un sentier boueux qui semble interminable avant d'arriver à l'abri. Le lac qui est situé plus bas est boueux et n'invite pas à la baignade. Mais le pire c'est la bécosse, que notre ami Fred avait rebaptisée à juste titre ''la fosse de malaisance''. Les murs étaient tapissés de cadavres de grosses mouches. Quand j'ai voulu m'approcher du bol de la toilette, une puis deux de ces énormes mouches à marde ont surgi du trou de la bécosse. Quand j'ai senti que l'une d'elles venait de me frôler la fesse, cela en était assez. J'ai pris mes cliques et mes claques et j'ai déguerpi à toute vitesse, traumatisée par cet endroit infame.
Par contre, contrairement à ce que d'autres en ont pensé, j'ai bien aimé l'abri du mont Craggy car la vue était belle avec la montagne et le soleil qui se couche juste en face de nous. L'inconvénient c'est qu'il faut faire un détour pour y arriver et que le point d'eau est un peu loin. Diane y est allée mais comme j'avais fait le plein d'eau au dernier ruisseau avant d'arriver, j'ai économisé mon eau et je n'ai pas eu besoin de reremplir mes bouteilles.
Les abris dans lesquels nous avons dormi et les amis randonneurs que nous avons rencontrés
J'aimerais aussi souligner les belles rencontres qu'on a faites durant notre traversée de la réserve, qui ont agrémenté nos journées dans le bois et nos soirées grace aux échanges, aux parties de YUM et avec qui on a vécu de belles émotions. Il y a d'abord eu notre trail angel Dilan, qui s'est arrêté sur le bord de la route le jour 1 pour nous offrir un gatorade et une pomme. Il avait fait le SIA en 2020 et s'en allait déposer des breuvages dans les boîtes de ravitaillement pour les marcheurs. Merci Dilan. On a même eu la joie de trouver un de ses gatorades en terminant au Petit-Sault. Puis il y a eu Fred, un autre fan du jeu de Yum qui était parti de Matapedia mais avait ralenti la cadence et terminait lui aussi à Petit Sault, Claudia et son chien Pretzel qui marchaient une section de 4 jours, Cathya qui marchait des 30 km par jour et nous a vite dépassé, Elle se rendait jusqu'à Mont-Louis, Charles et enfin Catherine qui était une thru hiker en devenir. Merci aussi les amis pour le kitkat et les M&Ms.
Le lac Matane, le plus bel endroit pour dormir dans la réserve et une journée parfaite pour nous ressourcer à mi-chemin de notre longue randonnée
Enfin, merci à mon amie Diane avec qui j'ai vécu cette merveilleuse aventure.
Depuis le jour 1 de cette aventure sur le SIA à Matapédia il y a 3 ans, j'avais un souhait, celui de voir surgir devant mes yeux le plus grand cervidé du Québec: l'orignal, quelque part sur le sentier. Cela n'était pas encore arrivé mais j'avais bon espoir qu'avec ses plus de 4000 orignaux c'était dans la réserve de Matane que j'allais enfin le rencontrer. Surtout que tous les randonneurs du SIA que j'ai connu jusqu'à présent ont à un moment ou un autre croisé un orignal.
Malheureusement, mon souhait ne s'est pas réalisé. Et pourtant, ce ne sont pas les signes qui ont manqué car on en voyait des traces tous les jours. Nous avons bien souvent emprunté les mêmes sentiers que lui mais sans jamais se croiser ou peut-être qu'il nous observait de loin.
L'année prochaine il nous reste une dernière section du SIA, de Mont St-Pierre à Forillon, pour terminer cette aventure mais à moins d'un miracle je commence à douter que mon souhait se réalise. Je serais curieuse de connaître les statistiques sur le pourcentage de randonneurs qui complètent le SIA au complet sans jamais voir un orignal.
En attendant, j'ai quand même adoré mon expérience et ma quête de l'orignal continue.
À suivre...
Ma quête de l'orignal...
Balise départ | Balise Arrivée | KM | Dénivelé + | Dénivelé - | hrs | Cumul | |||
Jour | Réserve faunique de Matane | ||||||||
1 | 01-août | De l'abri de St-Vianney à L'abri de la Rivière Matane | 478 | 460 | 17,4 | 260 | 419 | 6h20 | 17,4 |
2 | 02-août | De L'abri de la Rivière Matane au Camping/Abri du Ruisseau des Pitounes | 460 | 448 | 11,4 | 701 | 386 | 7h10 | 28,8 |
3 | 03-août | Du Camping du Ruisseau des Pitounes au Camping/Abri du Lac Tombereau | 448 | 435 | 13,4 | 654 | 735 | 8h00 | 42,2 |
4 | 04-août | Du Camping du Lac Tombereau au Camping de la Montagne à Valcourt* | 435 | 426 | 9 | 825 | 450 | 6h00 | 51,2 |
5 | 05-août | Du Camping de la Montagne à Valcourt au Camping/Abri du Lac Matane | 426 | 421 | 5,3 | 150 | 612 | 3h40 | 56,5 |
6 | 06-août | Du Camping du Lac Matane au Camping/Abri du Lac du Gros Ruisseau | 421 | 414 | 8,3 | 780 | 375 | 6h00 | 64,8 |
7 | 07-août | Du Camping du Lac du Gros Ruisseau au Camping/Abri du Mont Craggy | 414 | 405 | 9,8 | 728 | 786 | 7h00 | 74,6 |
8 | 08-août | Du Camping du Mont Craggy au Camping/Abri du Lac Beaulieu | 405 | 396 | 7,8 | 702 | 627 | 7h30 | 82,4 |
9 | 09-août | Du Camping du Lac Beaulieu au Camping/Abri du Petit-Sault | 396 | 382 | 14,8 | 776 | 1284 | 11h00 | 97,2 |
TOTAL | 96 | 97,2 | 5576 | 5674 |