Nous venons de terminer
notre trekking: 16 jours autour des Annapurnas. Nous sommes arrivés hier soir samedi 17 novembre à Pokhara situé à 900 m d'altitude
seulement. J'étais prête à continuer quelques jours pour terminer par Ghorepani et la vue de Poon Hill mais il fallait encore monter à 3210 m et Ashu en avait marre de marcher. Si je n'avais pas
eu le sac à dos à porter, j'aurais insisté un peu plus pour continuer mais je commençais à en avoir assez moi aussi de porter mes 8 kilos sur le dos tous les jours.
Je suis vraiment contente d'avoir fait ce trek. Ce fût toute une aventure et un challenge pour moi! Je n'avais encore jamais fait de trek en portant un sac à dos ni à une telle
altitude et cela a été difficile surtout au début. Les 1eres journées cela monte tranquillement mais surement à 880 m le 1er jour (Ngadi) et 1314 m le 2e jour (Jagat)... Mais avec plus de 6 hres de marche chaque jour, j'ai commencé à
sentir mes muscles des jambes. Cela m'a pris plusieurs jours à ne plus avoir de douleurs musculaires et à être capable de m'accroupir, tellement mes jambes étaient raides et
sensibles.
À partir du jour 9 et de l'altitude 4000 m, la veste Goretex, la veste polar, la tuque et les mitaines
s'imposaient toute la journée. La nuit nous avions nos sacs de couchage avec en plus de grosses couvertures pesantes et chaudes. Je n'ai jamais eu froid la nuit même si la température dans la
chambre était quasiment la même que dehors. Le plus dur c'était le soir dans la Lodge car avec le froid, même avec tous nos vêtements, on gelait. On essayait de repousser le plus possible l'heure
du souper mais vers 18h, on ne pouvait plus résister et on s'installait à table en attendant notre dhal bat (plat national népalais de riz, bouillie de lentilles et curry de légumes, le tout à
volonté) ou notre plat de spaghetti pour faire changement. Parfois on avait droit à un plat de braises chaudes ou un réchaud électrique sous la table avec une couverture par-dessus et
tous les trekkeurs s'agglutinaient autour pour tenter de se réchauffer. Une fois on a eu droit à un foyer au bois mais pas en haute altitude. Après le souper et à cause du froid on
retournait bien vite dans notre chambre et dans nos sacs de couchage pour nous garder au chaud. Nous avons fait une cure de sommeil: couchés presque toujours entre 19 h et 19 h 30 et debout au
lever du jour vers 6h. Après un copieux petit-déj: œufs durs, pain tibétain ou tsampa (porridge à la tibétaine) et tasse de thé, nous commencions à marcher à partir de 7h30 pour 5 à 6 hres en
moyenne par jour avec plusieurs arrêts pour boire un thé noir ou au lait et pour manger.
Notre nuit la plus haute, nous l'avons passé à 4885 m au Thorong High Camp, la dernière
Lodge avant le col. Il y faisait un froid de canard mais le ciel était parfaitement dégagé. Je n'ai dormi que par intermittence, à cause de l'altitude je crois mais aussi parce que nous devions
nous lever à 4h30 afin de franchir le col avant que le vent ne se lève. On se retrouve donc à 5h30 du matin avec nos lampes frontales à gravir la montagne dans la noirceur sous un magnifique ciel
étoilé mais une température autour de -15. Avant même cette 9e journée, nous avons rencontré plusieurs personnes qui ont rebroussé chemin car elles n'ont pas supporté l'altitude ou bien se sont
blessées, sans compter les histoires qui nous ont été racontées d'une française de 27 ans décédée un mois auparavant après avoir franchi le col et d'une autre touriste 15 jours
plus tôt. Tout cela fait réfléchir ainsi que la tête de certains trekkeurs souffrants de maux de tête, de diarrhée alors qu'on n'est qu'à 4000 m d'altitude. Moi qui ne m'inquiétais pas du
tout du problème de l'altitude mais juste de savoir si mes jambes allaient être capables de me porter moi et mon sac à dos, j'ai commencé à avoir des craintes et à me demander si on
s'était attaqué à trop difficile ou non. Bien sur je n'étais pas inquiète pour Ashu, qui semble toujours increvable et qui marche toujours trop vite pour moi même s'il porte le
plus gros des sacs (12-13 kilos). Pour notre journée la plus difficile, nous avons refait les sacs pour que je n'ai qu'à porter le minimum. Au bout de quelques minutes, j'avais déjà les
pieds gelés et même après avoir ajouté une 3e paire de bas, je ne sentais toujours pas mes orteils. Je me suis demandée si j'allais avoir des engelures ou si mes pieds allaient se réchauffer. Au
bout d'une heure de montée dans la neige, on arrive à une Tea House ou l'on peut se réchauffer et boire la plus chere de nos tasses de thé à 85R (1,3$) alors qu'en ville cela ne coûte que 5 à
10R. Il nous reste encore 400 m de dénivelé et environ 2 hres de marche avant d’arriver en haut. Je dois m'arrêter souvent pour reprendre mon souffle et chasser ce début de mal de tête.
Cela n'a vraiment pas été facile mais quelle joie de voir le panneau qui nous indique qu'on est arrivé au Thorong La. Il est exactement 8h! La vue est superbe: il y a les sommets enneigés et les montagnes arides vers lesquelles
nous nous dirigeons pour la descente. Après une séance photos, nous voici en chemin pour une descente que je croyais plus facile mais qui s'avère encore plus difficile que la montée car cela
descend énormément, très longtemps et le sentier est hyper glissant avec un mélange de neige fondante et de terre, ce qui fait qu'il est pratiquement impossible de rester longtemps sur ses
pattes. Je tombe plusieurs fois et deviens plus craintive car je n'ai pas envie de débouler jusqu'en bas. Bref cela nous prendra plus de 4 hres pour descendre et encore une autre heure pour nous
rendre jusqu'au très joli village de Muktinath. J'espère trouver là un peu
de chaleur mais à 3802 m, il fait encore froid. Enfin, une bonne douche chaude nous attend.
Le lendemain nous ne
marchons que 2h30 pour aller au village de Kagbeni (mon préféré) en bordure du
Mustang, région pour laquelle un autre permis est requis et qui coûte $700. Le village est essentiellement de culture tibétaine mais les maisons sont très vieilles, imbriquées les unes dans les
autres. Le matin et le soir, c'est le défilé des troupeaux de chèvres dans les ruelles étroites et pavées du village. C'est la fin de la mousson et on peut observer les femmes coupant le riz à la
faux et les hommes labourant les champs avec les bœufs. Plus bas, on verra les bœufs qui tournent en rond en piétinant les épis de riz pour en extraire les grains. Tout est tellement archaïque
dans ce coin du monde.
Pour notre 14e
journée, nous arrivons à Tatopani ou nous décidons de nous reposer une
journée pour profiter des hot springs. Quel plaisir de se baigner à 7h du matin dans ce bassin d'eau chaude avec la fraîcheur matinale. C'est pratiquement la fin de notre trek car le lendemain
nous n'avons que 3 hres de marche. Ensuite nous prenons une jeep pour aller jusqu'à Beni, un trajet réellement inconfortable sur un chemin de terre pourri qui me fait regretter la marche, surtout qu'on est entassé en arrière avec un couple de Coréens, un couple
d'Écossais, un népalais et un autre népalais complètement saoul qui tombe tout le temps sur Ashu. De Beni, il ne nous reste plus qu'à prendre le bus local qui nous emmènera jusqu'à Pokhara
vers 18h30. Arrivés de nuit, nous avons pris une chambre dans la 2e guesthouse visitée car le prix était correct. Finalement on va rester là car c'est bien situé et pas
cher.
En résumé, cela a été toute une expérience! Une expérience très différente du Zanskar car ici on est
dans une région très peuplée et sur un circuit assez touristique, ce qui fait que l'on traverse de nombreux villages tout le long et que l'on peut s'arrêter à peu près partout pour boire un thé,
pour manger ou pour dormir. Bien sur ce ne sont que de petits villages ou parfois juste une simple cabane et le confort est assez sommaire mais on a presque toujours eu de l'électricité
(parfois de façon sporadique) et très souvent une douche chaude grâce à l'énergie solaire, au chauffe-eau au gaz ou bien encore grâce au plus traditionnel sceau d'eau chaude préparé par
l'hôtelier. Impossible de se perdre sur ce circuit car il n'y a qu'un sentier, parfois très large. En effet, ils sont en train de construire une route qui un jour fera le tour. Parfois on trouve
quelques raccourcis, des panneaux qui nous indiquent la direction de Manang et surtout des gens tout le long qui peuvent répondre à nos questions sans compter les autres trekkeurs avec leur guide
et leurs porteurs qui eux aussi peuvent nous renseigner sur le trajet. La plupart des trekkeurs qu'on a rencontrés ont loué les services de porteurs et n'avaient donc pas à porter leur gros sac à
dos.
Au début les premiers villages ne sont pas très beaux mais plus on monte, plus le style change:
d'hindou le style devient tibétain avec de nombreux moulins à prières et murs de Mani. Les maisons aux toits de tôle sont remplacées par des maisons plus traditionnelles avec des fenêtres en bois
sculpté et des toits en bois et des pierres dessus pour les faire tenir. Ceux qu'on rencontre le plus sur le trajet, ce ne sont pas les trekkeurs mais bien les mulets qui sont le moyen de
transport pour la nourriture, le carburant, le papier de toilette...bref, pour tout ce dont un trekkeur occidental a besoin. Parfois ce n'est pas évident de circuler tellement il y a
de trafic dans les 2 sens avec le ding dong des cloches accrochées au cou des mulets qui nous indique qu'elles arrivent. Il vaut mieux alors se tasser très vite car ils ne s'arrêtent pas pour
nous.
Le paysage et la végétation changent à mesure que l'on monte en altitude. Au début c'est très vert. Ce
sont les orangers, les rhododendrons. Puis ce sont les pommiers, les pins et les érables. Au-dessus de 4000 m, il n'y a plus grand chose qui pousse. On découvre alors les montagnes dénudées qui
rappellent un peu le Zanskar. En redescendant c'est à nouveau la végétation dense qui refait son apparition et en une journée on passe de l'aride au vert car on descend de presque 2000 m de
dénivelé. Presque tout le long on voit des glaciers et des sommets: Annapurna 1, 2, 3... entre 7000 et 8000 m d'altitude. C'est magnifique.
On eu toutes les températures et tous
les climats imaginables: tropical humide au départ se transformant en un climat tempéré mais presque toujours sous un ciel nuageux les 1ers jours. On a bien aperçu un sommet enneigé le
2e jour mais pour seulement quelques minutes. À Pisang (5e journée) à 3185 m, il a même plu la nuit mais dès le lendemain matin nous avons eu un temps superbe avec un beau soleil pour notre
journée de repos à Manang, à 3500 m avant d'entreprendre la grande montée. C'est un très beau village avec une vue magnifique sur les sommets d'Annapurna 3 et de
Tilichio. Ils semblent si proches de nous. En bas il y a un petit lac de couleur bleu-vert. Mais quelle ne fût pas notre surprise quand vers 15h le ciel s'est couvert et que la neige a commencé
à tomber. La température a chuté drastiquement et le lendemain nous sommes partis sous un paysage très différent: cela ressemblait au Canada, sauf qu'ici il y a des yaks dans les champs
recouverts de neige.
Côté
santé, cela a quand même bien été. Le 5e jour, un couple d'Espagnols docteurs ont entendu Ashu tousser la nuit car ils dormaient
juste en dessous de notre chambre. Ils nous ont dit qu'il devrait prendre des antibiotiques sinon il risquait d'avoir des problèmes en haute altitude. On est donc parti avec une ordonnance d'un
médecin espagnol et on a acheté les antibiotiques dans la pharmacie du village suivant car on s'est dit que c'était plus prudent, surtout que j'ai commencé moi aussi à tousser à cause du
froid à la tête quand je me suis lavée les cheveux. En montant pour traverser le col de Thorong à 5416 m d'altitude j'ai eu quelques symptômes du mal de l'altitude: un mal de tête et légère envie
de vomir mais pas question de rebrousser chemin, surtout après tous les efforts pour en arriver là. Alors j'ai pris un Tylenol et je m'arrêtais souvent et cela n'a pas
duré.